Les principes du débat constructif

Lorsqu'on observe un désaccord avec quelqu'un, on cherche souvent à en débattre. Mais il existe différentes façons de débattre, qui correspondent à des démarches parfois opposées.

Quand on cherche à débattre de manière constructive, le but est de faire émerger un consensus et de se rapprocher de la vérité, mais aussi d'enrichir sa réflexion (en comprenant mieux les raisons qui justifient notre position et celle de notre interlocuteur.rice).

Réussir à débattre de cette manière est loin d'être évident. Heureusement, il existe quelques principes de base qui minimisent les risques de frustration ou de dispute et qui favorisent le débat constructif.

Vous pouvez en savoir plus ici sur l'origine de ces principes et sur les autres principes possibles pour réguler un débat constructif.

Bienveillance

On entretient souvent une certaine hostilité à l'égard des personnes qui sont en désaccord avec nous. C'est particulièrement le cas quand l'objet du désaccord nous tient à cœur ou que l'on s'identifie directement aux idées que l'on défend. Pourtant, une discussion constructive est impossible dans une atmosphère d'agressivité. Réussir à mettre de côté notre hostilité est donc une condition fondamentale pour pouvoir débattre sereinement, et ce respect mutuel doit être maintenu à toutes les étapes de l'échange. Cela évite que le débat ne se fasse au détriment du bien-être de ses participant.e.s.

Conseils pratiques

• N'ayez jamais de propos insultants, agressifs, moqueurs, ou qui pourraient être interprétés comme tels. En particulier, le sarcasme, l'ironie et la provocation sont à proscrire, car leur effet principal est d'exaspérer votre interlocuteur.rice.

• Écoutez activement votre interlocuteur.rice et ne lui coupez pas la parole. Ne vous précipitez pas non plus pour prendre la parole dès que l’occasion se présente : laissez suffisamment de temps à votre interlocuteur.rice et à vous-même pour réfléchir tranquillement.

• Rappelez-vous que vous n’êtes pas réductible aux idées que vous défendez : on peut critiquer vos idées sans vous critiquer en tant que personne. De même, votre interlocuteur.rice ne se réduit pas à ses idées non plus.

• Soyez attentif.ve aux conséquences psychologiques que le débat peut avoir pour votre interlocuteur.rice et pour vous. En particulier, ne lui donnez pas le sentiment de se faire agresser ou harceler.

• Gardez en tête que toutes les occasions ne sont pas bonnes pour débattre ! Assurez-vous donc que votre interlocuteur.rice est disposé.e à débattre et que les circonstances le permettent.

Ouverture d'esprit

Débattre nous amène à examiner les arguments qui justifient nos idées. En approfondissant notre réflexion, on peut donc être amené.e à changer d'avis au cours du débat. Plutôt que de se cramponner coûte que coûte à notre opinion initiale, il est donc important de se garder la possibilité de changer d'avis à tout moment. Pour cela, il faut dès le début se montrer curieux.se de ce que pense notre interlocuteur.rice, essayer de comprendre sa manière de penser et envisager la possibilité d’entendre des arguments convaincants.

Conseils pratiques

• Avant de vous lancer dans un débat, prenez un temps pour réfléchir à ce que vous attendez du débat. Êtes-vous dans de bonnes dispositions d'ouverture d'esprit pour y prendre part ?

• Signalez à votre interlocuteur.rice que vous êtes prêt.e à changer d'avis si les arguments sont convaincants – cela ne pourra que l’inciter à faire de même !

• Faites part à votre interlocuteur.rice du progrès de votre réflexion en indiquant quand vous trouvez ses arguments convaincants. De la même manière, n'hésitez pas à indiquer votre degré de confiance dans les positions que vous défendez.

Coopération

Un débat constructif est le fruit d'une coopération. Malheureusement, on confond couramment « débattre » avec « combattre », en considérant notre interlocuteur.rice comme un.e adversaire qu'il s'agit d'affronter à coup d'arguments. C’est notamment le cas quand on l’étiquette comme appartenant à un « camp ennemi » qui aurait forcément tort. Le but est alors de dominer et de ne pas perdre la face, ce qui encourage la mauvaise foi et l'utilisation d'arguments médiocres. Il est préférable de considérer notre interlocuteur.rice comme un.e partenaire, avec qui l'on peut faire – ensemble – des progrès dans notre réflexion et l’exploration de notre désaccord.

Conseils pratiques

• Quand vous présentez vos arguments, concentrez-vous sur ceux que vous jugez les plus pertinents, ceux dont la remise en question pourrait vous faire changer d'avis. Cela implique de ne pas cacher les éventuelles faiblesses de votre argumentation, mais plutôt de les mettre en évidence.

• Interprétez les propos de votre interlocuteur.rice en supposant (au moins initialement) qu’il ou elle est sincère et que ses arguments ne sont pas absurdes.

• Interrogez votre interlocuteur.rice sur les considérations qui pourraient lui faire nuancer sa position.

• Quand vous reformulez les propos de votre interlocuteur.rice, assurez-vous qu'il ou elle est d'accord avec votre reformulation : cela permet d'éviter d'en faire un « homme de paille », c'est-à-dire de les décrire de manière caricaturale ou incohérente. Vous pouvez même essayer d'aider votre interlocuteur.rice à trouver les meilleurs arguments pour défendre sa position.

Clarté

Pour qu'un débat soit constructif, il est nécessaire que la communication se fasse de la manière la plus transparente possible. Notre interlocuteur.rice n'est pas dans notre tête : si l'on n'exprime pas nos idées de manière claire, il ou elle n'a aucune chance de les comprendre et d'y réagir. Quelle est exactement l'idée que l'on défend ? Quelles sont nos raisons d'y souscrire ? C'est en répondant à ces questions que l'on peut identifier le cœur du désaccord, ou bien montrer qu'il est purement verbal, quand il résulte simplement de définitions différentes de certains concepts. Une fois le cœur du désaccord identifié, on peut l'explorer plus en détail tout en s'assurant que le sujet ne dérive pas subrepticement au fil de la discussion.

Conseils pratiques

• Définissez les concepts que vous employez, surtout quand ils sont ambigus, et ne jouez pas sur les mots.

• N'hésitez pas à demander des clarifications quand vous n'êtes pas sûr de bien comprendre la position ou les arguments de votre interlocuteur.rice. En particulier, quand un point de son argumentation vous paraît surprenamment plus faible que les autres, cela peut être un indice que vous ne l'avez pas bien compris.

• Pour éviter les débats trop décousus, n'hésitez pas à vérifier régulièrement avec votre interlocuteur.rice que le désaccord persiste, et essayez si possible de vous mettre d'accord sur quelques conclusions avant de passer à un autre sujet.

• Soyez patient.e si votre interlocuteur.rice ne semble pas tout comprendre immédiatement : essayez plutôt de reformuler votre propos ou demandez lui des précisions sur ses points d’incompréhension.

• Quand vous faites des affirmations qui portent sur des faits empiriques, réfléchissez à ce qu'elles impliquent en pratique, à la manière dont on pourrait les corroborer ou les infirmer. C'est une première étape nécessaire avant d'aller éventuellement rechercher des études existantes sur la question.

• Essayez d’exprimer vos idées de manière synthétique et organisée.